Managers : pourquoi déléguer reste votre arme secrète
- Isabelle DELPLACE
- il y a 2 jours
- 8 min de lecture
Dernière mise à jour : il y a 1 jour

Comme l’a dit Théodore ROOSEVELT :
« Le meilleur manager est celui qui sait trouver les talents pour faire les choses, et qui sait aussi réfréner son envie de s’en mêler pendant qu’ils les font. »
En cette période de rentrée, ou tout s'accélère, ou les agendas sont souvent surchargés, j'ai pensé utile de vous inciter à (ré)interroger les délégations que vous pourriez faire ...
Souvent mal comprise, la délégation est un outil puissant pour libérer du temps et développer les collaborateurs.
En effet, repenser la délégation comme outil stratégique de management pour optimiser son temps et responsabiliser ses équipes, n'est pas naturels et il existe de nombreux freins. Beaucoup hésitent à déléguer car ils craignent que ce soit plus long ou moins bien fait. Ils gardent tout, pensent maîtriser mieux. Pourtant, en 2025, déléguer reste une solution pragmatique pour gérer les priorités. Elle crée une forme de partage qui favorise l’implication de l’équipe.
De plus, on constate, que ce mécanisme permet de gagner en sens et répond aux nouvelles attentes des bons collaborateurs. Ceux qui cherchent plus d’impact, car la délégation les engage.
C'est pourquoi j'explore ici avec vous, quels sont encore les freins qui nous empêchent de optimiser cet atout managérial, puis de démonter le pourquoi déléguer reste un véritable atout, et comment y parvenir avec des repères et des exemples.
1. Les freins autour de la délégation
Il existe 4 types de freins autour de la délégation qui se combinent la plupart du temps
Les freins culturels et organisationnel, qui peuvent s'exprimer dans certaines organisations qui valorisent depuis toujours, l’expert. Ce statut étant envié, ce dernier garde naturellement et précieusement tous les "secrets" de ses savoir-faire, ou encore l'absence de cadre clair ou personne ne connait de règles précises ni d'outils pour répartir les responsabilités ou pour finir la valorisation du contrôle, voire du sur contrôle, c'est à dire lorsque le manager est responsable de toutes les erreurs et doit ou veut tout maitriser.
Les freins contextuels que l'on rencontre notamment lorsqu'il y a une pression forte et systématique des délais. La période est tendue, et par conséquent déléguer parait risqué, ou un manque de visibilité sur les priorités ce qui rend difficile l'identification des tâches à déléguer, ou encore dans un contexte de fort turnover dans lequel il semble compliqué de déléguer de nouvelles responsabilités
Les freins des collaborateurs, qui n'ont soit pas confiance en leurs capacités, soit peur que la délégation ne vienne s'ajouter à son emploi tu temps déjà chargé, soit par peur de l'échec, du jugement, voire d'une sanction, ou pour finir une impressions de ne recevoir que les tâches ingrates qui vient s'ajouter à un manque de reconnaissance.
Les freins liés au manager, qui craint de ne plus maîtriser le résultat, de perdre le contrôle, ou qui doute des compétences ou de la motivation de ses collaborateurs, ou encore qui pense qu’il fera mieux et plus rapidement en traitant la tâche lui-même, ou qui envisage la délégation trop longue à expliquer quand il ne s'agit pas de la voir comme une menace pour leur rôle
De fait, les appréhender vous permettra de mieux les contrer à l'avenir. Voici quelque idées pour démarrer :
Adopter un regard factuel : La délégation ne réduit pas la qualité si on cible bien les tâches, et que l'on formalise un cadre précis et évolutif.
Commencer petit. Déléguer une tâche simple permet d’observer les effets sans risque, de renforcer la confiance du collaborateur ainsi que celle du manager avant d'aller plus loin.
Suivre de près, et ne pas tomber uniquement dans le contrôle. Prévoir un point et un accompagnement régulier suffit pour réaliser les ajustements adéquates.
Expliquer, Partager pourquoi on délègue et faire preuve d'écoute active pour veiller à donner les moyens suffisants et aider le collaborateur à lever ses craintes.
Par exemple ;
Une PME a confié la préparation d’un dossier à un collaborateur débutant. L’équipe a respecté les délais et le dirigeant a pu passer à un dossier stratégique. Ce progrès a mesuré un gain de qualité et un engagement renforcé.
De nombreuses entreprises notamment technologiques utilisent des matrices RACI pour clarifier qui fait quoi. Cela réduit les malentendus, aide à organiser la délégation en évitant la surcharge.
Ces pratiques restent rares malgré leur impact. Des habitudes persistent, comme l’idée qu’« on fait mieux seul ». Pourtant, la délégation améliore la réactivité et construit les compétences. Elle prouve qu’on peut déléguer judicieusement, sans compromis.
2. Pourquoi déléguer est une compétence clé en 2025
La délégation occupe une place centrale dans la gestion d’équipe en 2025. Les contextes de travail sont plus rapides, plus complexes et demandent des décisions prises au bon moment. Un manager qui garde toutes les tâches perd du temps. En déléguant, il concentre son énergie sur ce qui a le plus d’impact : stratégie, coordination, relation avec les parties prenantes.
La délégation n’est pas qu’un gain de temps. Elle responsabilise les collaborateurs. Confier une mission à un membre de l’équipe, c’est lui donner un espace pour développer ses compétences.
Didier Retour dans son ouvrage,que je recommande, " La délégation managériale. Levier de compétences et de développement stratégique » montre que c'est une dimension indispensable dans l’action du manager lorsque celui-ci se trouve dans une organisation flexible, où les individus comme les équipes sont de plus en plus autonomes, où le nombre de niveaux hiérarchiques est réduit, où le niveau de formation et les compétences des employés sont en croissance régulière et, où, finalement, le management participatif est de plus en plus présent. Il positionne la délégation managériale comme un des ingrédients centraux de l’avantage concurrentiel des entreprises qui adoptent des modèles organisationnels innovants. d'autre part, Les enquêtes du CIPD (2023) montrent que les salariés qui reçoivent des responsabilités élargies se sentent plus engagés et plus motivés. voici des données concrètes, ce n'est pas qu'une intuition.
En 2025, les différents enjeux des Entreprises demandent plus d’agilité. Un manager qui garde tout ralentit l’équipe. Déléguer change cette dynamique. Une tâche confiée à un collaborateur compétent est une décision qui évite l’engorgement et accélère le travail collectif.
L’impact va plus loin. Les collaborateurs prennent confiance, l’équipe gagne en autonomie. Le manager, lui, retrouve du temps pour anticiper les enjeux à venir.
Des études du Boston Consulting Group (2022) indiquent que les entreprises où la délégation est structurée observent un gain de productivité de 20 à 30 %.
En résumé, déléguer en 2025, c’est :
Se concentrer sur ses missions stratégiques.
Responsabiliser et faire progresser son équipe.
Éviter les blocages liés à la surcharge individuelle.
Maintenir un collectif plus réactif et plus autonome.
C’est une compétence clé parce qu’elle relie directement le temps du manager, la performance de l’équipe et l’efficacité de l’organisation.
3. Une Méthode en 5 étapes
Étape 1 — Identifier les tâches à déléguer
Il faut commencer à dresser une liste des activités des 2 à 3 dernières semaines. Puis, barrer ce qui relève clairement de sa responsabilité directe (décisions stratégiques, arbitrages sensibles, sujets RH confidentiels).
La plupart des tâches restantes deviennent candidates. Les bons “premiers choix” sont souvent des dossiers administratifs ou de suivi : consolidations de chiffres, préparation de rendez-vous, rédaction de comptes rendus, mises à jour d’un tableau, suivi d’échéances. Ce sont des tâches récurrentes, à faible risque, avec un résultat attendu clair.
Pour trier efficacement il est utile de recourir à la Matrice d’Eisenhower,

on peut également se poser les trois questions suivantes :
Impact : si tu gardes la tâche, combien de temps gagnes-tu pour des tâches à plus grande valeur ajoutée ?
Répétitivité : revient-elle chaque semaine ou chaque mois ?
Transmissibilité : peux-tu fournir, un process, un exemple fini ou une checklist ?
Étape 2 — Choisir la bonne personne
Être attentif à toutes les appétences, les motivations de l'ensemble des collaborateurs de son ou ses équipes. En effet, lorsqu'un collaborateur montre de l’intérêt, privilégie cette option. L’engagement augmente, l’apprentissage suit. Ce point n’est pas théorique : les études sur la qualité du travail lient autonomie, clarté des rôles et engagement. En France, le rapport IGAS 2025 rappelle d’ailleurs que la part d’organisations à faible autonomie dépasse la moyenne européenne. D’où l’intérêt de créer des espaces de responsabilité concrets via la délégation.
Pour choisir la bonne personne pour déléguer une tâche, il faut au préalable se poser 3 questions :
Ai-je confiance en mon interlocuteur ? OUI ou NON pour qu'il prenne en charge au mieux cette délégation, et a-t-il les compétences nécessaires pour le faire, et si non quels moyens puis-je lui donner ?
Si je mesure le temps que je vais consacrer pour déléguer cette tâche ou mission, est ce un gain ou une perte de temps, sachant qu'il faut faire une évaluation sur du long terme et non à court terme pour ne pas perdre de vue qu'au départ il s'agit d'un investissement.
et enfin, A quel style de management dois je faire appel ? Plutôt top down (descendant) ou participatif ?
Étape 3 — Formuler clairement : quoi, pour quand, comment on saura que c’est fait
Sachant que la première chose à faire est de valoriser la mission et rechercher l’accord du ou des délégataires, car une délégation ne s’impose pas.
Ensuite c'est la clarté du cadre posé, en ne cherchant à définir l’issue plutôt que de dicter chaque geste .
Voici la trame de formalisation que je préconise à faire signer des deux parties pour valider l'accord mutuel passé :
Contexte : à quoi sert le livrable. Valorisation du service rendu à l'équipe, l'entreprise
Résultat attendu : format, champs, borne de temps. L’objectif est clair, le résultat visé est exprimé de façon explicite avec des critères de réussite. L'outil SMART s'avère pour cette phase très utile.
Les Moyens délivrés : budget, matériel, temps, formation…
Contraintes : règles, confidentialité, validations. Les limites de la délégation et le niveau de décision sont précisés ainsi que les modalités pour rendre compte.
Points de contrôle : Le suivi est organisé avec des moments pour faire le point. Ainsi que les cas alertes à faire remonter.
L'accompagnement : les disponibilités du managers, les soutiens possibles, le suivi des progrès, La délégation doit rester adaptée aux compétences et à la motivation du collaborateur.
Étape 4 — Former et lancer la délégation
Ne jamais lâcher quelqu’un sans formation, sans outils pour réaliser une tâche qu'il n'a jamais faite auparavant, ne pas perdre de vue que "ce n'est pas parce que je sais que mon interlocuteur sait aussi, au contraire la posture de pédagogue et d'écoute active est nécessaire.
Il suffit parfois de donner un process, un exemple fini (même ancien), un modèle vierge, et/ou une checklist d’acceptation, ou bien n'hésitez pas à prévoir un temps de formation suffisant, En synthèse votre enjeu sur cette étape est de mettre toutes les chances du côté du ou des collaborateurs choisis de réussir la délégation. Cela renforcera à la fois votre leadership et la confiance réciproque entre eux et vous.
Pour le suivi, un tableau RACI clarifie qui est Responsable, qui est Approbateur, qui Conseille, qui est Informé.
En bref, mettre en œuvre le cadre donné, sans le micro-gérer.
Étape 5 — le suivi
Deux types d'entretiens sont à distinguer :
le point d'étape qui permet d'évaluer les résultats intermédiaires, de faire le point sur les difficultés rencontrées et les différents succès du collaborateur
le suivi progrès (ou accompagnement au progrès) qui s'espacera pour disparaitre lorsque la compétence sera maitrisée
Dans ces entretiens de suivi, il est important d'éviter le sur-contrôle et les mauvaises surprises, son objectif est de sécuriser le collaborateur et le manager dans la montée en compétences du collaborateur.
En général, il suffit de planifier 15 minutes au milieu de la semaine. Cela laisse le temps de lever les blocages, confirmer l’avancement et ré-aligner les critères.
Personnellement j'utilise un ordre du jour fixe :
Ce qui est fait (2 minutes).
Ce qui est réussi et/ou qui bloque (5 minutes).
Décisions / arbitrages (5 minutes).
Prochain pas (3 minutes).
Cette cadence courte et régulière permet de tenir l’équilibre entre confiance mutuelle, autonomie et soutien.
Elle s’appuie sur une idée simple tirée des bonnes pratiques : définir les points de contrôle au moment où tu délègues.
Conclusion
La délégation est loin d'être un gadget managérial.
Créer des espaces de délégation à rendre les rôles plus clairs. En 2025, elle sert à clarifier qui fait quoi, à gagner du temps, et à faire grandir l’équipe tout en permettant au manager de grandir lui aussi.
En effet, l’usage de cet atout, permet aux managers d’être à la fois efficace et humain.
Quand vous déléguez, non seulement vous gagnez du temps, mais encore vous faites grandir votre équipe, vous distribuez l’effort.
Ainsi, en évitant de tout faire seul, vous construisez une dynamique d’équipe.
Bref, vous ne raccourcissez pas votre rôle. Vous le rendez plus pertinent. La délégation ne vous affaiblit pas. Elle vous force à penser à ce qui compte vraiment et à mieux gérer votre équipe.
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